Norman Borlaug, né en 1914, vient de nous quitter en septembre 2009. Il fait partie des ces hommes de science intelligents, dynamiques et arrogants qui, comme Liebig, Kekule, Haber, Müller et beaucoup d'autres avant et après lui, poursuivant des idées somme toute généreuses, ont permis à des multinationales de la chimie de tuer l'agriculture raisonnée, empoisonnant les terres, polluant les rivières et les mers, pour enrichir leurs actionnaires, grâce à une croissance sans contrôle. Après avoir ruiné les paysans et les artisans de chez nous ils ont décimé les campagnes du tiers-monde.

Durant des décennies, les grands décideurs, souvent corrompus, ont écouté et suivi les théories séduisantes de Borlaug, sans adopter le moindre principe de précaution, malgré les réserves d'autres hommes de science. Il est vrai qu'au début de ses recherches, avant les dérapages, ses travaux d'agronome semblaient aller dans le bon sens. En sélectionnant les semences, en croisant entre elles des variétés de céréales naines plus productives, plus robustes et moins vulnérables aux parasites, il a fait œuvre utile. Mais, lorsqu'il se mit à encourager le gigantisme des exploitations, l'usage forcené des pesticides et des engrais chimiques dévastateurs, il devint un criminel.

Certes, Borlaug n'était pas un méchant homme, il pensait bien faire, en toute bonne foi ! Il souhaitait sauver l'humanité de la misère et de la faim, comme le bon docteur Armand-Delille espérait, vers la même époque, prémunir la paysannerie contre les ravages occasionnés par les lapins, en leur injectant la myxomatose ! Gardons nous d'oublier que ce fut l'extermination des loups et des renards qui avait permis au lapin de pulluler ! Dans la nature tout se tient !

Là où Borlaug s'est complètement planté, c'est en encourageant, sans prendre de recul suffisant et sans aucune précaution, l'usage des OGM, prônant l'ensemencement de surfaces immenses, supprimant les haies, les zones humides, éradiquant du même coup les oiseaux, les papillons, les abeilles et d'autres insectes utiles, tuant aussi les petits mammifères prédateurs naturels des nuisibles.

Il restera dans la mémoire des hommes comme un savant plein de bonne volonté qui en toute bonne conscience aura pollué la planète pour des siècles, faisant plus de mal à l'humanité que les pires dictateurs.

Je ne sais si, avant de quitter notre terre qu'il a allègrement salopée, Norman Borlaug, prix Nobel de la Paix 1970 (???) a pris conscience du mal qu'il lui a fait et s'en est repenti ?

Décidément, l'enfer est toujours pavé de bonnes intentions !

« L'Histoire tragique des errements de Norman Borlaug
me fut contée jadis par Jean Peneaud. » (Marc Schweizer)